Déclaration liminaire au CSA Ministériel Jeunesse et sports du 5 juillet 2023.
Un contexte explosif qui dépasse le champ de notre ministère
Le drame qui s’est produit à Nanterre et qui a provoqué la mort de Nahel, jeune homme de 17 ans, est profondément choquant. Le parquet de Nanterre, en mettant en examen pour homicide volontaire et en demandant le placement en détention provisoire du policier auteur du coup de feu mortel, considère que les conditions légales de l’usage de l’arme à feu n’étaient pas réunies. La justice doit poursuivre son travail dans la sérénité pour faire toute la lumière sur les causes de cette tragédie.
L’heure n’est ni à l’exploitation de la mort de Nahel pour souffler sur les braises de la colère, ni aux tentatives de minimisation du drame par certaines organisations. Alors que nous connaissons depuis plusieurs jours des violences, des atteintes aux personnes et aux biens qui sont inacceptables, nous le réaffirmons, la responsabilité de toutes et tous est de contribuer à l’apaisement, et d’engager une politique de cohésion sociale digne de ce nom, ambitieuse, globale et cohérente afin de construire une société fraternelle, solidaire et apaisée.
La sidération, la crainte d’être victime des violences, la mémoire parfois vive de précédentes émeutes déclenchées par des violences policières inadmissibles, le fait que la situation continue de se dérouler sous nos yeux, tout cela ne permet pas d’avoir immédiatement une analyse juste et complète. Mais cela ne peut pas, ne doit pas justifier une réponse uniquement sécuritaire puis de tout remettre sous le tapis.
Pour le Sgen-CFDT, il est urgent et temps d’organiser des états généraux des quartiers sensibles et de réunir l’ensemble des acteurs (sociaux, éducation nationale, éducation populaire, sport, justice, police, élus, etc.) pour aboutir à un véritable plan global d’actions.
La part de l’Éducation nationale et de la Jeunesse et des sports dans la crise que nous traversons
Cela dépasse le seul domaine de compétence du ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse et celui des sports et des jeux olympiques, c’est une certitude. Pour autant, non seulement des écoles et établissements scolaires, des équipements sportifs, des MJC, ont été la cible de dégradations allant jusqu’à la destruction, mais la déflagration se traduit par le fait que des jeunes, parfois des enfants, relevant de l’obligation scolaire, devant bénéficier de l’obligation de formation à 18 ans sont parmi les acteurs des violences de ces derniers jours et de ces dernières nuits. Si rien n’est fait, comment envisager sereinement la mise en œuvre des Jeux olympiques et paralympiques dans un an ?
Dans l’immédiat, le système éducatif fait face à une crise majeure. Pour le Sgen-CFDT, dans pareille situation, il est indispensable que les autorités académiques structurent le dialogue social avec les organisations représentatives des personnels : partager des informations, des analyses, des propositions pour faire face à une situation difficile à vivre professionnellement. C’est aujourd’hui très rarement le cas, tout se passe comme si les organisations syndicales n’étaient pas considérées comme des interlocuteurs majeurs pour agir, pour définir ensemble les voies et moyens de soutenir, protéger, mais aussi préparer l’après. Il est aussi indispensable que les autorités académiques prennent la mesure d’une double responsabilité : au titre de la mise en œuvre des politiques scolaires et au titre de la mise en œuvre des politiques de jeunesse, des sports et de la vie associative.
Le Sgen-CFDT n’était pas favorable au transfert des personnels jeunesse et sports des directions régionales et départementales jeunesse et sport – cohésion sociale aux services déconcentrés de l’Éducation nationale. Que les autorités académiques, aujourd’hui, n’aient pas le réflexe de réunir tous les acteurs éducatifs du territoire avec l’appui et l’expertise des personnels techniques et pédagogiques jeunesse et sports démontre s’il en était besoin que ce transfert de personnel n’a en rien amélioré la capacité à coordonner des politiques éducatives dans un objectif de cohésion sociale. La polarisation de leur activité au service du SNU d’une part et des politiques scolaires de l’autre (ou parfois leur éviction pure et simple de l’articulation entre les politiques scolaires et les politiques éducatives au sens large) prive l’État et les acteurs locaux d’une ingénierie éducative qui serait pourtant particulièrement précieuse dès maintenant.
Remettre les priorités à l’endroit
Dans nombre de DSDEN, les sollicitations relatives à l’expression de l’expertise des services jeunesse et sport dans le cadre des portés à connaissance de l’État pour la politique de la ville sont ignorées, court-circuitées pour répondre uniquement avec le logiciel scolaire.
On arrive d’ailleurs maintenant à une situation ubuesque où l’on demande aux collègues d’accompagner les clubs dans les QPV à déposer des demandes de soutien, sur des financements de l’état qui ont été transférés aux fédérations et qu’ils ne maîtrisent plus, tout en sollicitant des contrôles dans le cadre des CLIR.
On ne peut pas dire que c’est un échec, mais on peut dire que ça ne marche pas.
La carte des postes jeunesse et sports : inquiétudes sur les spécialités, l’opacité du mouvement et les petits arrangements
Nous aimerions, pour continuer, évoquer des questions RH relatives à la carte des postes. Les reçus aux concours de CEPJ auront-ils des missions en lien avec leurs spécialités ? Aura-t-on au moins la garantie, comme le demandent avec nous des inspecteurs généraux, l’assurance que l’action en responsabilité de ces stagiaires pourra au moins être reliée à ces spécialités ? Ou sinon peut-être faudrait-il évaluer la réalité et l’effectivité de l’exercice dans la spécialité à l’occasion des échanges sur les missions et les moyens. Au vu des besoins, il faut également se poser la question des spécialités n’ayant pas encore été appelées au concours.
L’examen des postes, au sortir d’un mouvement qui nous parait bien peu lisible, à proposer aux sortants de concours, continue à nous interroger sur divers arrangements locaux qui nous interpellent sur des questions fondamentales. Concernant les lauréats d’outre-mer par exemple, certaines situations actuelles nous laissant très perplexes, mais aussi concernant la possibilité ou non d’être stagiaire dans un Établissement.
Enfin, nous devons dénoncer, a priori à l’unisson avec les autres collègues, l’émergence de pratiques locales consistant à transformer par exemple des postes de CAS en CEPJ, comme nous avons pu le découvrir avec stupeur lors d’un dernier CSA-SA pour le service des Vosges. Un CEPJ et un prof de Sport, s’ils ont beaucoup de points communs, ne sont pas interchangeables et leurs missions non plus. Qu’un DASEN s’inquiète de l’éventualité du SNU obligatoire et hop ! On décide de supprimer un poste de CAS alors que ce service avait toujours nécessité un renfort du fait de la prévalence des activités de pleine nature et du suivi des écoles de ski et qu’en plus d’autres postes y sont vacants.
On nous signale ailleurs d’autres transmutations alchimiques de ce genre et nous demandons que ces pratiques cessent immédiatement tant que les services n’ont pas retrouvé leur ligne de flottaison.
Des inquiétudes sur d’autres sujets à l’ordre du jour : VSST, formation, EAFC
Enfin, concernant l’ordre du jour, nous devons exprimer nos plus vives réserves sur le projet de texte relatif aux VSST et notre inquiétude devant les manques criants. Est-ce uniquement à mettre sur la précipitation à produire ce document ou est-ce au contraire la traduction au fond d’un engagement pour ce sujet qui n’arrive pas à dépasser le stade de la formalité pour se donner bonne conscience ? Au vu de ces manques et malgré qu’il soit uniquement présenté pour information, nous jugeons nécessaire de renforcer ce texte par un ensemble d’amendements indispensables.
Concernant le PNF, nous considérons que sur une trajectoire d’améliorations, même si les modalités d’élaboration des propositions restent pour nous insuffisantes. Nous saluons les efforts au titre de la préparation aux concours et ceux de la DJEPVA dans les thématiques métiers en regrettant que la DS ne suive pas cette démarche.
Nous ajouterons notre voix à celle des collègues concernant l’absence de prise en compte par les EAFC des thématiques jeunesse et sport, l’absence de recherche de réelles propositions permettant de développer des actions communes EN/JS, les innombrables freins au départ en formation que doivent subir les collègues.
Enfin, nous rappelons notre consternation devant la mise en oeuvre de la réforme des retraites, condamnant les salariés à 2 ans fermes et dans une négation du dialogue social.