La réunion du comité technique ministériel de ce 13 décembre est quasi exclusivement consacrée à l’information sur la répartition des emplois dans le cadre de la préparation de la rentrée 2023.
La perspective de nouvelles suppressions d’emplois, qui fait suite à celles des années précédentes, est nécessairement la perspective d’une dégradation des conditions d’exercice des personnels.
Dans le premier degré, les créations des dernières années n’avaient déjà pas suffit à assurer dans de bonnes conditions l’ensemble des priorités politiques affichées, l’intensification du travail s’est poursuivie.
Dans le second degré, les suppressions d’emplois vont nécessairement se traduire par des transformations d’heures postes en heures supplémentaires même si les effectifs élèves prévus sont en diminution.
Dans les services administratifs, la charge de travail est déjà forte, souvent à la limite du supportable, au point que les risques psychosociaux, nous le disons depuis plusieurs CTMEN sont élevés. C’est l’objet aussi de plusieurs courriers à la secrétaire générale dont ceux sur les enjeux de la bascule vers RenoiRH.
Dans les filières médicales, sociales et de santé, les besoins d’accompagnement et de suivi des élèves sont importants et les schémas d’emplois des années passées tout comme la difficulté à pourvoir les postes alimentent une perte de sens du travail.
Notre système éducatif est fragile, il ne souffre pas de ce que certains appellent idéologiquement une administration administrante, mais de sous-administration chronique.
Il ne pâtit pas de ce que certains voudraient qualifier tout aussi idéologiquement de manque d’engagement professionnel des personnels, mais ses acteurs et actrices s’épuisent du fait de l’intensification progressive mais bien réelle de leur travail, de la perte de sens, du sentiment d’être contraints de mal faire le travail.
Notre système éducatif est donc très fragile. Pour le Sgen-CFDT, une programmation pluriannuelle des investissements est indispensable pour redresser progressivement la situation.
Depuis plusieurs mois et années même, le déficit d’attractivité des métiers de l’éducation est documenté. Si le constat semble partagé, les moyens mis en œuvre ne sont pas encore à la hauteur.
Le schéma d’emploi est un élément puisqu’il a des conséquences directes sur les conditions d’exercice de chacun et chacune.
L’amélioration des rémunérations est impérative pour restaurer l’attractivité.
Sur ce volet, les attentes sont fortes chez les personnels tout autant sans doute que la défiance vis-à-vis de ce qui sera mis en œuvre.
Beaucoup de nos collègues sont désabusés. Il est donc important qu’à la reprise de l’agenda social en janvier, la concertation, je n’ose prononcer le mot de négociation sur ce sujet, permette de construire des mesures justes, qui assurent à tous les personnels la reconnaissance de leur travail et non un accroissement supplémentaire de leur charge de travail.
Pour le Sgen-CFDT, c’est le temps de la reconnaissance et pas celui de la résurgence du travailler plus pour gagner plus.
Il faut aussi que l’agenda social concerne bien tous les agents et pas uniquement la filière enseignante. Nous attendons un calendrier et une méthode de travail précise sur l’ensemble des enveloppes prévues au PLF.
L’occasion de rappeler que la revalorisation nécessaire au choc d’attractivité ne sera pas épuisée après le PLF 2023, ni avec sa montée en charge en 2024. Là aussi, la programmation pluriannuelle est nécessaire.
Il faudra veiller à ne pas décevoir les personnels sur le volet revalorisation. Ils sont déjà très attentifs et certainement prêts à se mobiliser si le gouvernement persiste dans sa volonté dogmatique de reculer l’âge légal de départ à la retraite. C’est bien à l’exécutif de ne pas nourrir la conflictualité.
Il y a d’autres chantiers sur lesquels les personnels sont en attente.
Dans la voie professionnelle, ils attendent que les difficultés dans la mise en œuvre de la transformation de la voie professionnelle soient reconnus et corrigés. Ils attendent que les évolutions à venir confortent la triple vocation de la voie professionnelle : former des citoyens et citoyennes, former des professionnels à l’insertion dans la vie active bien préparée, et aussi ouvrir les possibles vers la formation post-bac.
Cela suppose une articulation et un équilibre entre enseignements généraux, enseignements professionnels et pédagogie de l’alternance. Les personnels qui forment un tiers des lycéen.ne.s plus souvent que les autres issu.e.s des catégories sociales les moins favorisées, plus souvent que les autres en situation d’inclusion à divers titre, ces personnels doivent être mieux considérés et reconnus, il faut leur donner la capacité à bien réaliser leur travail.
La négociation télétravail n’a pas encore pu aller à son terme
Il y a encore des points importants à stabiliser pour nous déterminer. Le Sgen-CFDT vous le savez attend de l’accord qu’il élargisse les possibilités de recours au télétravail pour les agents qui le souhaiteront et dans le respect du principe du double volontariat.
Pouvez-vous nous indiquer quel sera le calendrier de reprise de la négociation ?
Une autre négociation importante doit s’ouvrir. Il s’agit de celle qui concerne la prise en charge de la protection sociale complémentaire par l’employeur.
Un accord fonction publique majoritaire fixe un cadre dans lequel les négociations ministérielles doivent s’inscrire. Les enjeux sont importants pour les agents aussi bien en termes de couverture des risques que de pouvoir d’achat avec à la clé une prise bien plus importante par l’État de la cotisation de chacun et chacune.
Là aussi, pouvez-vous nous indiquer comment et quand le ministère engagera la négociation avec les organisations représentatives des personnels ?
Les personnels font face aussi à des défis plus immédiats.
Tout d’abord la contestation des enseignements dispensés et des choix pédagogiques des enseignantes et enseignants pour traiter les programmes et viser la meilleure acquisition des connaissances et compétences par les élèves.
Ce sont les menaces qui ont visé notre collègue de Valenciennes obligeant à renoncer à un projet pédagogique. Ce sont les attaques encore ce week-end d’un élu du mouvement Reconquête.
Ceux qui s’inquiètent si violemment des atteintes à la laïcité restent bien silencieux face à cette contestation qui use une nouvelle fois des mêmes méthodes d’intimidation, de publication des noms et adresses professionnelles de personnels qu’ils désignent à une vindicte populaire.
Nous nous rappelons ainsi des menaces contre les équipes qui mettaient en place les ABCD de l’égalité, ou contre les signataires de la pétition “je n’enseignerai plus le masculin l’emporte”. C’est bien l’éducation à l’égalité, à la solidarité qui sont ainsi attaquées. C’est bien la capacité des enseignants à définir les meilleures stratégies pour faire réussir les élèves qui est visée. Le Sgen-CFDT considère que ces atteintes à la laïcité du système éducatif correspondent à une contestation de l’article 12 de la charte de la laïcité.
Le ministère se doit de protéger les agents visés, mais aussi de dénoncer ces attaques contre l’École.
Les personnels doivent aussi faire face depuis plusieurs années à des crises de natures différentes, qui appellent un travail en réactivité, parfois au-delà de leurs missions habituelles, au-delà des horaires de travail.
Pour autant, notre ministère n’a jamais conçu une politique RH adaptée à cette réalité :
le Sgen-CFDT demande l’ouverture de négociation pour réguler et reconnaître les astreintes, permanences et sujétions spéciales à la fois en termes d’organisation du travail en temps de crise et de rémunération.
Ces dernières années de nombreux personnels ont donné beaucoup pour assurer contre vents et marées le fonctionnement de l’École. La préparation des risques de délestage en matière énergétique ne peut se faire une nouvelle fois sans aucune reconnaissance des agents de tous métiers qui sont appelés à suivre, traiter et diffuser une information en urgence, à réorganiser à la dernière minute le fonctionnement d’écoles, collèges et lycées.
Le candidat, entre-temps réélu Président de la République avait annoncé un grand plan sur la qualité de l’air.
Force est de constater que nous l’attendons toujours. Nous le rappelons, un tel plan est utile. Utile par rapport à l’épidémie de Covid qui n’est pas terminée, par rapport à la diffusion de toutes nombreuses affections respiratoires. C’est utile aussi de manière plus générale, des études scientifiques ont démontré que la forte concentration en CO2 est corrélée à des baisses d’attention des élèves. Par ailleurs, un tel plan, en permettant le renouvellement des fenêtres (celles qui ne ferment plus, comme celles qui ne s’ouvrent plus ou pas assez), en permettant une amélioration des conditions de ventilation et purification de l’air aussi bien en hiver qu’en été rendrait les établissements scolaires plus résilients aux températures extrêmes. Dans le contexte de changement climatique que nous connaissons, ce n’est pas superflu.
Ce comité technique ministériel est le dernier avant l’installation du comité social d’administration issu des élections professionnelles qui se sont achevées la semaine dernière. Enfin, presque terminée puisqu’il manque encore la désagrégation des votes pour la composition des CSA spéciaux de proximité.
Pouvez-vous nous indiquer ce qui retarde cette procédure ? Nous aurons dans les mois qui viennent des réunions de bilan de ce scrutin.
Cela nous semble indispensable. Le bilan ne devra pas être uniquement technique mais aussi politique au sens du nécessaire mais insuffisant engagement des ministres et cabinets ministériels tout au long du processus de préparation des élections, mais aussi de conduite du dialogue avec les représentants du personnel qui ne produit pas assez de résultat pour les agents.