Éducation nationale, Enseignement agricole, Enseignement supérieur, Jeunesse et Sports, formation initiale ou continue face à des enfants, des adolescents ou des adultes : des publics d'apprenants a priori distincts, mais y a-t-il deux métiers différents, celui d’enseignant et celui de formateur ?
Le Sgen-CFDT est un syndicat général. Il syndique notamment toutes les catégories de personnels exerçant des missions de formation initiale ou continue face à des enfants, des adolescents ou des adultes, que ce soit dans l’Éducation nationale, l’Enseignement agricole public, l’Enseignement supérieur ou la Jeunesse et les Sports.
Face à des publics à priori distincts d’apprenants, y a-t-il deux métiers différents, celui d’enseignant et celui de formateur, ou au contraire un seul, fondé sur des gestes professionnels communs ?
Groupements d’établissements (Greta)
De l’importance du métier de formateur…
Activités satellites de l’Éducation nationale, la formation continue des adultes a, de tout temps, été le terrain d’expérimentations pédagogiques. Loin de reproduire les canons de la formation initiale, la nature des publics et de leurs besoins, les financeurs et leurs exigences ont façonné un creuset dans lequel ont pu voir le jour des réponses pédagogiques individualisées, personnalisées, intégrant la validation des acquis et de l’expérience (VAE) dans des parcours modulaires diversifiés.
Que ce soit de la part de collègues titulaires en postes gagés ou en heures supplémentaires ou plus généralement de collègues sous statut de contractuel, la souplesse et l’innovation des réponses apportées par les Greta ont su faire de ce réseau le premier opérateur français de formation continue sur les territoires.
Au moment où la voie professionnelle aurait besoin de tirer parti de ces expériences pour construire les parcours modulaires diversifiés, associant une pluralité de statut que le Sgen-CFDT appelle de ses voeux, la déstabilisation des structures Greta par des politiques publiques régionales discriminantes (en région Auvergne-Rhône-Alpes par exemple) au mépris des grands opérateurs publics de formation (l’association pour la formation professionnelle des adultes – Afpa Greta), conduisent à des plans sociaux auxquels nous n’étions pas habitués.
Ainsi, des collègues, après vingt à trente ans de « boutique », se voient proposer des contrats à 25, 15 et parfois même 5 %, les condamnant au refus de signer des avenants ou des renouvèlements qui sont tout simplement indécents.
Au-delà des situations individuelles que les élus et militants du Sgen-CFDT, aux niveaux local, académique et national, sont engagés à défendre pied à pied, c’est l’institution toute entière qui, justement, se tire une balle dans le pied en se séparant de ses experts, de sa culture pédagogique au moment précis où l’on est sûr d’en avoir un besoin impératif !
En effet, la nouvelle réforme de la formation professionnelle et l’évolution attendue de la voie professionnelle sous statut scolaire laissent présager d’un besoin accru d’une individualisation des parcours et des réponses pédagogiques.
Enseignant·e-chercheur·e
Sortir de l’isolement
Jeune maîtresse de conférences, sans aucune formation pédagogique à l’époque, j’ai fait des cours en amphi très traditionnels, j’ai enseigné, cherché à transmettre mes savoirs, en pensant qu’il suffi sait d’expliquer, quitte à « occuper la scène », pardon l’estrade, en m’adressant à mon public, mais je savais qu’il n’y aurait pas véritablement de réponses.
Puis au fil du temps, je me suis interrogée sur cette forme de transmission des savoirs. Les étudiants ne retenaient pas grand-chose, ils apprenaient pour l’examen, mais qu’en restait-il ? Et pire, à la question fatidique, « qu’est-ce que vous savez faire ? », posée en entretien de recrutement, ils ne savaient pas répondre, parce qu’ils ne comprenaient pas quel usage – autre que réussir l’examen – ils pouvaient faire de ces apprentissages, y compris pour des matières avec des applications pratiques qui me semblaient évidentes.
Mais à bien y réfléchir, si je reprenais mon propre cas, quand avais-je vraiment appris ? Quand j’avais été actrice de ma propre formation. Durant ma thèse, parce que j’avais cherché des réponses à mes questions, soit en lisant ce que d’autres avaient écrit, soit en expérimentant directement. Quand j’avais commencé à enseigner, avant même d’être MCF, en TD. Parce que pour pouvoir enseigner, il faut avoir été acteur du sujet.
Mais en enseignant à d’autres, on ne transmet pas la démarche. Alors former, oui, mais comment ?
En amenant les étudiants à chercher seuls des réponses à leurs questions, en contextualisant l’apprentissage via un problème qui les intéresse et sur lequel eux vont travailler, etc. Bref, en les rendant acteurs.
En obtenant une formation initiale des maîtres de conférences (MCF) stagiaires, le Sgen-CFDT a fait acter le principe qu’enseigner à l’université est aussi un métier qui s’apprend. Il permet de rompre l’isolement des débuts de carrière. Pour comprendre aussi le dilemme auquel sont soumis les enseignants-chercheurs entre enseigner et chercher, lire l’article : Enseignant.e.s-chercheur.e.s : un ethos professionnel en tension
Lycée professionnel
Enseigner et former
Sur un cycle de trois ans, le lycéen effectue vingt-deux semaines en milieu professionnel, dont la place dans le calendrier scolaire est malheureusement fonction des agendas du lycée : contrôle en cours de formation (CCF), bac blanc, conseils de classe… Se pose alors la question de l’efficacité de ces périodes en milieu professionnel puisque c’est l’agenda du lycée qui prime sur la considération des conditions optimales d’apprentissage pour l’élève.
Les temps en milieu professionnel varient selon les différents établissements et métiers, or certaines compétences doivent être pré-acquises pour une immersion rapide du jeune en situation professionnelle. Durant ces périodes, il mobilise des compétences apprises à l’école et en acquiert de nouvelles qu’il pourra réinvestir au lycée. L’enseignant doit donc adapter ses séquences. Cette pédagogie de l’alternance permet d’évaluer les apprentissages en cours de formation sous la forme de CCF et les apprentissages en milieu professionnel à travers des grilles de compétences. Cette double appréciation donne une note qui compte pour le diplôme du baccalauréat, par exemple.
Des blocs de compétences transversales évaluées par l’enseignant de la discipline professionnelle et l’enseignant de l’enseignement général donnent davantage de sens à l’ensemble des apprentissages : compétences à l’oral, à l’écrit, autour du savoir-être, compétences de transfert…
Enseignement agricole public
Enseigner et former : une porosité recherchée
Une des originalités de l’enseignement agricole public, à laquelle le Sgen-CFDT tient, est la localisation dans un même établissement des trois voies de formation : initiale, apprentissage et formation continue.
Ainsi, les enseignants en formation initiale du lycée côtoient (et travaillent avec) quotidiennement les formateurs du centre de formation des apprentis (CFA) et du centre de formation professionnel et de promotion agricole (CFPPA). La réussite de l’enseignement agricole vient en partie de cette proximité.
En effet, l’enseignement initial a su importer des pratiques mises en oeuvre avec succès en formation pour adulte : la volonté de permettre une acquisition progressive des acquis a permis de faire connaitre très tôt les intérêts du contrôle continu ; les formateurs de CFA/CFPPA ont des postures plus attentives face aux apprenants ; l’alternance et la volonté de diversifier les supports de formations sont des passages obligés pour la formation pour adultes ; et la mise en situation professionnelle, en utilisant notamment l’exploitation agricole annexée à chaque établissement est un objectif constant.
Les formateurs CFA/CFPPA et la culture de ces centres de formation sont des biens précieux pour l’enseignement agricole.
Les inspecteurs et l’administration en sont conscients ; pourtant, les rémunérations et l’organisation des services des formateurs sont très diverses d’un centre à l’autre, et certaines sont inacceptables.
JEUNESSE ET SPORTS
À Jeunesse et Sports, la formation est une des missions statutaires des personnels des corps techniques et pédagogiques, qu’ils soient conseillers techniques et pédagogiques supérieurs (CTPS), conseillers d’éducation populaire et de jeunesse (CEPJ), ou professeurs de sports (PS, à ne pas confondre avec les PEPS), qui lorsqu’ils sont affectés en services déconcentrés peuvent être conseillers techniques sportifs (CTS) placés auprès des fédérations sportives ou conseillers d’animation sportive (CAS)…
Mais depuis que le ministère Jeunesse et Sports est passé, au gré des réformes successives, d’un service public de formation à un service public de certification, émettant à la chaine des diplômes (BPJEPS, DEJEPS, DESJEPS) en s’appuyant sur des opérateurs de formation privés, ces collègues ne font plus de face-à-face pédagogique, mais de l’ingénierie de formation – dans le meilleur des cas –, et le plus souvent sous-traitent, assurant seulement, en principe, un contrôle de la qualité des formations.
Seule une minorité de professeurs de sport, exerçant en tant que formateurs dans les établissements publics de formation (Insep, Creps et écoles nationales), interviennent effectivement dans la formation des jeunes sportifs de haut niveau, des cadres sportifs, et dans les formations des disciplines à « environnement spécifique » (sports à risques de la mer ou de la montagne…) que ces établissements sont les seuls habilités à organiser.
Pour aller plus loin :