Lors du comité technique ministériel de l'Education nationale du 20 mai 2020, un projet de décret relatif au service national universel était présenté pour avis.
Le texte a reçu un avis défavorable unanime de toutes les organisations syndicales représentatives.
Que prévoit le texte ?
Le texte présenté le 20 mai 2020 ne permet pas encore la mise en oeuvre d'un service national universel obligatoire pour toute une cohorte de jeunes. Cependant, il prépare cette étape à venir et prévoit la possibilité, selon les capacités d'accueil de généraliser ce qui n'a été en 2019 qu'une expérimentation dans quelques département. Il s'agit donc de donner une base réglementaire aux trois étapes du SNU qui se déroulent l'année qui suit la 3ème :
- séjour de cohésion de 12 jours,
- mission d'intérêt général,
- phase d'engagement.
En 2020, il est prévu que le séjour de cohésion, à titre exceptionnel à cause du Covid19, ait lieu pendant les vacances de la Toussaint, et donc après la mission d'intérêt général.
Pourquoi le Sgen-CFDT a voté contre
Depuis le début du quinquennat, le Sgen-CFDT s'est engagé dans toutes les discussions auxquelles il a été convié sur le SNU, la CFDT a porté ses propositions dans le cadre du conseil d'orientation des politiques de jeunesse (COJ). Ces échanges ont confirmé le fait que pour le Sgen-CFDT, le SNU n'est pas la politique de jeunesse que nous voulons.
Par ailleurs, sa généralisation sur la base d'un satisfecit de l'expérimentation ne tient pas : l'expérimentation s'est faite avec quelques jeunes volontaires au profil sociologique bien différent de l'ensemble d'une génération. La satisfaction exprimée par ses jeunes est indéniable, tout comme l'est le fait que cet échantillon de volontaire n'est pas du tout représentatif de l'ensemble d'une classe d'âge.
Lorsque le SNU est présenté dans ses grands principes et objectifs, il est indéniable que plusieurs sont intéressants :
- Créer de la mixité sociale
- Développer la citoyenneté
- Valoriser l’engagement des jeunes
- Emanciper la jeunesse
Mais au-delà, force est de constater que ce service national universel repose sur d’autres principes et des modalités problématiques, et parfois même contradictoires avec des objectifs pourtant intéressants :
- Le caractère obligatoire (à terme) contredit la logique d’engagement et d’émancipation,
- Le caractère universel est contredit par l’exclusion de certains jeunes au regard de la situation administrative de leurs parents (il nous a été dit lors de plusieurs réunions qu'il n'était pas certain que les jeunes étrangers puissent y participer, et que les jeunes étrangers dont les parents sont en situation irrégulière ne pourraient pas y participer), c’est une entorse certaine au principe universel et à l’objectif de mixité sociale conçu pour lutter contre les stéréotypes, les discriminations et les fractures sociales,
- L’idée que 15 jours de cohésion pourraient suffire à lutter contre les stéréotypes et discriminations est illusoire :
- Cela n’appartient pas uniquement aux jeunes, cela ne peut pas reposer que sur la jeunesse,
- Des études en sciences humaines et sociales montrent que de tels dispositifs, sur cette durée, et sans que d’autres politiques embarquant l’ensemble de la société ne soient menées, peuvent au contraire renforcer les stéréotypes,
- De nombreux sujets soulevés par le Sgen-CFDT depuis qu’il y a des échanges sur le SNU restent toujours sans réelle réponse :
- Comment articuler dans le temps séjour de cohésion et formation des jeunes (prévoir un séjour de cohésion pendant les vacances de la Toussaint, c’est priver les jeunes de ce temps de repos, de respiration, c’est aussi inévitablement une obligation pour leurs enseignants de s’adapter à cela en termes de programmation du travail, mais aussi au retour en termes de gestion des relations entre élèves qui auront fait le SNU, et ceux qui en auront été exclus, ces derniers se voyant signifier d’une manière violente leur exclusion) ?
- Comment valoriser les compétences acquises pendant le SNU ?
- Comment articuler les diagnostics réalisés pendant le SNU et la mise en œuvre effective des suivis apparaissant nécessaires, quelle que soit le territoire et la situation économique dans lesquels le jeune vit ?
- Le financement et les moyens humains alloués au SNU risquent d’avoir de puissants et délétères effets d’éviction :
- Sur les politiques jeunesse et vie associative :
- Risque d’assèchement du financement aux associations
- Risque d’embolie des services JSCS : accaparés par le SNU, comment pourront-ils continuer à investir l’ensemble de leurs missions ?
- Sur les politiques d’éducation, d’enseignement supérieur et de formation,
- Sur les autres politiques et dispositifs de lutte contre le décrochage et en faveur de l’insertion des jeunes.
- Sur les politiques jeunesse et vie associative :